La démarche de Mariah

Rouleau d’écorce de bouleau à motif de plantes

Au départ, j’ai consacré beaucoup de temps à la recherche : bibliothèques, publications à comité de lecture et archives. Cet exercice m’a permis de me familiariser avec le rouleau et de préciser mon projet. J’ai également obtenu des renseignements utiles sur le regard porté par des individus et des institutions à l’extérieur des peuples autochtones.

Il était essentiel de ne pas inscrire le rouleau dans le contexte occidental de l’attribution de valeur, mais plutôt de faire preuve de respect envers ce membre fondamental de la Nation anishinabe. Faisant fi des obstacles, ce petit morceau d’écorce, malmené par les mains d’étrangers, a non seulement réalisé son but premier, mais il continue de dispenser des enseignements.

Le plus gros de ma recherche a consisté à explorer le rouleau non seulement comme un objet concret, mais comme un outil, un gardien du savoir, le fragment matériel d’un être et la somme immatérielle de nombreux autres.

Conversations, récits échangés, mode de fabrication d’un rouleau et temps passé en compagnie de la terre et des communautés qui ont vu naître cette technique comptent parmi les aspects les plus enrichissants de ma recherche. En tant que communicateur, le rouleau est un réceptacle qui absorbe et diffuse de l’information. La communicatrice en moi était attirée vers son espace : l’espace existant entre l’apport et son résultat. C’est l’exploration de cet espace et les conversations que j’ai eues avec mes nièces et neveux qui m’ont le plus apporté.

Mon but était de me rapprocher de ce rouleau, et, ce faisant, de lui permettre de guider ma perception du monde qui m’entoure. C’est de cette démarche que Waawiyekidewin est né.

Le projet de Mariah

Le cycle de vie des rouleaux d’écorce de bouleau suit un perpétuel mouvement circulaire. Les longues bandes d’écorce nourries par leur environnement sont soigneusement récoltées. Légère, souple et imperméable, l’écorce portera très longtemps son histoire. Lorsqu’une bande arrive à la fin de sa vie, une nouvelle bande reprend son histoire. À travers les différents cycles de l’écorce, l’histoire évolue afin de mieux représenter la communauté dont elle est porteuse. Le cycle de vie de la communauté suit lui aussi un perpétuel mouvement circulaire, se dilatant et se contractant à travers la parenté, la terre et, surtout, les histoires.

Sans structure communautaire qui lui permet d’exprimer, d’absorber et de poursuivre son histoire, le rouleau d’écorce de bouleau n’a pas sa raison d’être. La langue employée pour graver l’histoire ne saurait être lue sans la mémoire, mais elle est suffisamment riche pour se prêter à chacune des narrations.

C’est pour cette raison que le rouleau qui a servi d’inspiration à Waawiyekidewin m’est inaccessible. Isolé de sa communauté, de son contexte et de son cycle de renouvellement, sa fonction est irrémédiablement perdue. Plutôt que de transmettre son histoire à la prochaine génération, enrichissant et nourrissant la communauté, il demeure inactif, à s’empoussiérer. Et à quelle fin ?

D’après les recherches menées dans le cadre du projet Découvrir / Reconstruire, ce rouleau serait porteur d’une recette de tisane. C’est pour cette raison que Waawiyekidewin explore la guérison à travers le regard du rouleau d’écorce de bouleau. Au-delà du déracinement communautaire du rouleau, Waawiyekidewin cherche à exprimer la résilience et le pouvoir des histoires ainsi que le langage des rouleaux d’écorce de bouleau.